Calvaire de Riaillé

Qui connaît l’histoire du calvaire de Riaillé, qu’on peut voir au champ de foire et qui a donné son nom à la rue qui y monte ?
Le registre paroissial de Riaillé en relate la bénédiction, le 4 octobre 1896.

Le 4 octobre, dimanche du Rosaire, la paroisse de Riaillé prenait part à une bien touchante cérémonie. Il y a déjà plus de 2 ans, une croix, souvenir d’une précédente mission, se brisait tout à coup sous la violence de la tempête. M. l’abbé Mauduit, de vénérée mémoire, n’avait pu réparer ce désastre, car la mort venait le frapper quelque temps après.

Son successeur, M. l’abbé Brétéché devait avoir cet honneur et cette consolation. Dans ses courses apostoliques au pays des pardons, M. le curé avait admiré ces magnifiques calvaires que l’on rencontre si nombreux en Bretagne. Aussi, son désir était de doter sa paroisse d’un de ces chefs d’œuvre inspirés par la foi. Mais la chose était bien difficile : comment demander de nouveaux sacrifices à une population qui s’en était déjà tant imposé ! Son église grandiose qui domine la vallée de l’Erdre n’a-t-elle pas en effet coûté bien des sueurs et bien des privations. M. le curé n’hésite pas cependant, il fait part de son projet et aussitôt il est compris. Les familles dévouées qui sont le soutien de toutes les bonnes œuvres lui apportent un généreux concours, et les ouvriers, les fermiers, les riches et les pauvres, les enfants eux-mêmes veulent y participer.

Grande est la joie du pasteur qui s’adresse sans retard à l’éminent artiste sculpteur de Lannion, M. Hernot. Quelques mois après, le travail était exécuté. Trois pierres forment ce nouveau calvaire : le piédestal en granit bleu de Lannion porte ces mots : « jubilé national 1896 », le fût entouré d’une banderole sur laquelle on lit « gloire et amour à Jésus crucifié » est artistiquement travaillé ; la croix en granit de Kersanton est d’un travail merveilleux et couronne admirablement le tout.

Si l’année jubilaire 1896 doit compter dans les annales de France, son souvenir sera ineffaçable à Riaillé, car ce cadeau en perpétuera la mémoire. A l’ouverture du jubilé pour sa paroisse, M. le curé a voulu donner à son peuple la joie d’entendre la parole toujours éloquente et toujours appréciée du RP Ricordel. Pendant ces quelques jours qu’il a passé au milieu de nous, le zélé missionnaire a su faire beaucoup de bien à la foule qui se pressait au pied de la chaire, avide de  recueillir ses précieux enseignements.

Le dimanche du Rosaire était le jour choisi pour la bénédiction du nouveau calvaire. Malgré la pluie continuelle, malgré la longueur de la route, la paroisse toute entière, on doit le dire à sa louange, était là. Sitôt les vêpres terminées, la procession se déroule rapidement et se rend au pied de la croix qui se dresse majestueusement dans les airs. La foule se groupe avec empressement pour ne pas laisser échapper une parole de l’apôtre de Dieu. Le R. Père captive aisément son auditoire. Il le félicite de sa foi et loue son courage qui ne saurait faiblir. Le peuple de Riaillé n’est pas du nombre de ceux qui capitulent. La croix est l’étendard du chrétien, son espérance, son drapeau …. Le soldat préfère la mort à la souillure, le marin voit son navire s’abîmer dans les flots et il meurt plutôt que de se rendre à l’ennemi. Il en sera ainsi des habitants de Riaillé, ils défendront leur foi et leur drapeau jusqu’à la mort.

La foule écoute avec bonheur cette chaleureuse allocution, son recueillement est admirable, l’ordre parfait, la joie brille dans tous les regards.

M. le curé de Notre Dame de Bon Port qui, avec son amabilité ordinaire, a bien voulu accepter de présider cette cérémonie, procède alors à la bénédiction solennelle du nouveau calvaire. En ce moment, une émotion indicible remplit tous les cœurs. Avec quelle force, quelle unanimité, on acclame Jésus crucifié ! Les cris de « Vive la religion ! vive la croix, vive Jésus-Christ, vive Dieu ! » sortent de toutes les poitrines.

Heureux habitants de Riaillé, gravez dans vos cœurs le souvenir d’une si belle fête, et quand vous passerez au pied de cette croix, notre drapeau et notre espérance, vous redirez à nouveau « Gloire et amour à Jésus-Christ crucifié ! »

Gardez aussi dans votre souvenir le nom du pasteur qui a été l’inspirateur de cette œuvre et qui a travaillé avec vous à son digne couronnement.